Lettre intersyndicale CSRD

Madame/Monsieur le/la Ministre, Les organisations syndicales (CFDT, CGT, CFE-CGC et UNSA) souhaitent attirer votre attention sur les discussions en cours au sein de l’Union européenne concernant les normes de durabilité.‌  

Courrier commun CFDT / CGT / CFE CGC / UNSA à l’attention de :   Premier Ministre 
M. François BAYROU
Ministre de l’Economie des Finances et de la 
Souveraineté industrielle et numérique 
M. Eric LOMBARD
Ministre du Travail 
Mme Catherine VAUTRIN
Ministre de la Transition écologique, de la 
Biodiversité, de la Forêt, de la Mer et de la Pêche
Mme Agnès PANNIER RUNACHER
Souveraineté industrielle et numérique 
M. Eric LOMBARD
Ministre du Travail 
Mme Catherine VAUTRIN
Ministre de la Transition écologique, de la 
Biodiversité, de la Forêt, de la Mer et de la Pêche
Mme Agnès PANNIER RUNACHER Paris, le 24 juillet 2025

Madame/Monsieur le/la Ministre,

Les  organisations  syndicales  (CFDT,  CGT,  CFE-CGC  et  UNSA)  souhaitent  attirer votre  attention  sur  les  discussions  en  cours  au  sein  de  l’Union  européenne concernant les normes de durabilité.
Pour les organisations syndicales françaises (CFDT, CGT, CFE-CGC et UNSA), ces normes sont essentielles pour appréhender la transition écologique, en particulier climatique. Nous savons tous que ce sont les plus modestes qui subissent les effets les plus durs de cette transition et qui en supportent le coût. 
Les informations de durabilité – en mettant sur le même plan dans les entreprises les informations  financières,  économiques,  sociales,  environnementales  et  de gouvernance – permettent de mieux comprendre et d’articuler les enjeux et priorités pour agir en faveur de la transition juste exigée par le Green Deal européen. 

Ce reporting constitue un levier précieux de dialogue social. Il permet d’anticiper les effets  de  la  transition  sur  les  emplois,  la  transformation  de  leurs  métiers,  de l’organisation  et  des  conditions  de  travail  dans  toute  la  chaine  de  valeur.  C’est pourquoi les organisations syndicales françaises souhaitent garder l’intégralité des données de la CSRD. Pourtant une majorité des entreprises soumises à la DPEF (ou NFRD),  ont  su  mener  à  bien  l’exercice  CSRD  –  comme  en  témoignent  de nombreuses analyses (1) .
Le backlash écologique, sous couvert de la compétitivité, a conduit la Commission européenne  à  proposer  des  reculs  considérables  au  travers  de  la  proposition OMNIBUS qui retarde et réduit drastiquement les exigences en matière sociale et environnementale.  Par  la  suite,  des  propositions  encore  plus  radicales  ont  été avancées  par  le  Conseil,  suggérant  de  relever  le  seuil  de  chiffre  d’affaires  à  450 millions d’euros, ainsi que par le rapporteur du Parlement européen qui a proposé un seuil fixé à 3 000 salariés. 
Des voix fortes se sont élevées pour préserver l’ambition initiale, comme la BCE qui a  rappelé  le  8  mai  la nécessité  de  maintenir  le  seuil  d’application  à 500  salariés, soutenant les normes ou, pour le moins, une simplification raisonnable et raisonnée. De même, les amendements récents défendus par les Verts européens, Renew et S&D montrent un désaccord profond avec la proposition du Conseil.  La décision de la Commission européenne de repousser  à fin novembre 2025 la publication des normes  simplifiées  va  dans  le  bon  sens,  car  elle  permettra  une  concertation approfondie avec les parties prenantes. Les données de durabilité sont un outil stratégique pour les entreprises et leur modèle d’affaires, y compris dans la chaine de valeur. Elles révèlent les forces et les fragilités des  modèles  économiques  actuels.  En  ce  sens,  elles  permettent  aux  entreprises d’organiser et de renforcer leur résilience dans un monde aux ressources limitées, tout en assurant une transformation durable. Il s’agit là d’une condition indispensable à leur compétitivité sur le long terme.
La transparence publique offerte par la CSRD est essentielle : elle encourage les investissements verts et prépare l’ensemble des acteurs économiques, employeurs comme salariés, aux mutations liées à la transition écologique.
 
(1)  Voir à ce sujet les rapports de l’ORSE, de Deloitte, KPMG, etc.En France, il ne serait ni juste ni efficace de faire de la simplification des normes un 
levier prioritaire de compétitivité. Si la position française sur les marchés extérieurs s’est affaiblie au cours des quinze dernières années, rien ne permet d’affirmer que ce  recul  serait  dû  à  un  excès  de  normes.  Les  leviers  d’un  redressement  durable résident ailleurs : investissement dans la recherche et développement, montée en compétences  via  la  formation  professionnelle,  renforcement  des  capacités commerciales, relance industrielle… Les normes de durabilité, loin d’être un frein, peuvent  au  contraire  constituer  une  opportunité  :  elles  permettent  d’orienter  les investissements  vers  des  secteurs  d’avenir  et  plus  résilients.  Quant  à  la  directive CS3D, elle s’inscrit dans la continuité du devoir de vigilance dont la France a été pionnière, et offre un cadre d’harmonisation minimal pour des pratiques économiques plus responsables à l’échelle européenne.
Afin  de  garantir  un  équilibre  acceptable  entre  la  simplification  et  le  maintien  des objectifs fondamentaux de reporting de durabilité, la CFDT  portent les propositions ci-dessous :
– Maintien  de  la  double  matérialité  et  du  principe  de  « do  not  significantly 
harm »  (DNSH),  c’est-à-dire  les  exigences  minimales  des  droits  sociaux. 
L’implication  des  parties  prenantes,  et  notamment  des  représentants  des 
travailleurs  dans  cette  analyse  augmente  la  qualité  et  la  pertinence  des 
résultats ;
– Maintien  des  normes  thématiques  et,  en  l’absence  en  l’état  des  normes 
sectorielles, l’introduction d’une souplesse permettant d’ajuster les normes 
agnostiques aux besoins sectoriels ;  
– Concernant  les  normes  sociales,  le  maintien  de  la  définition  de  salaires 
décents selon la méthodologie harmonisée, préconisée par l’OIT : en effet, 
certaines entreprises utilisent le salaire minimum ou une autre méthodologie 
;
– Prise  en  compte  des  dix  premiers  pays  en  effectifs,  et  non  des  pays 
dépassant 10 % des effectifs, pour éviter les angles morts géographiques 
dans les analyses.
– Seuil  d’application  de  la  norme  fixé  à  500  salariés  et  50  M€  de  chiffre 
d’affaires,  conformément  à  la  définition  de  la  grande  entreprise  dans  la 
directive  comptabilité,  et  pour  ne  pas  reculer  par  rapport  à  la  NFRD  en 
vigueur depuis 2014. – Pour les entreprises en-dessous de ce seuil, nous préconisons un reporting 
volontaire dans le sens des VSME ;
– Par ailleurs, une limitation de la chaine de valeur au rang 1 des entreprises 
viderait de substance et priverait finalement l’objet de la directive. La CSRD 
et la CS3D doivent être alignées à ce sujet.
S’agissant  de  la  CS3D,  nous  appelons  au  maintien  des  seuils  actuels  et  de  la référence aux plans de transition. Ne pas harmoniser le devoir de vigilance au niveau européen revient à accepter un patchwork de dispositifs législatifs qui complexifient la vie des entreprises et desservent l’objectif de respect des droits humains.
Les organisations syndicales françaises (CFDT, CGT, CFE-CGC et UNSA) appellent les Ministres à soutenir ces propositions afin de maintenir un instrument cohérent, efficace et comparable à la hauteur des enjeux de la transition écologique.
Nous restons à votre disposition pour approfondir les échanges.
Veuillez agréer, Monsieur/Madame le/la Ministre, l’expression de notre considération la plus distinguée.
                     Marylise Léon                                  Sophie Binet
                 Secrétaire Générale                        Secrétaire Générale 
                          (CFDT)                                            (CGT)
                   François Hommeril 
                           Président 
                         (CFE-CGC)
                     Laurent Escure 
                  Secrétaire Général 
                            (UNSA)